jeudi 17 novembre 2016

Une abstention intime. Gustavo Mazzatella

Samedi 5 novembre 2016, Dominique De Villepin invité politique chez Ruquier, pour la sortie de son livre « Mémoire de paix pour temps de guerre ». Je regarde sur Youtube, vidéo de 48 minutes, il va quand même bien se dire pendant ce temps-là des choses intéressantes... Malheureusement, c’était sans compter sur les protagonistes principaux de cette émission, qui n’aura décidément jamais eu la moindre once d’utilité. Je suis encore trop naïf, parfois...

Ruquier se sent obligé de lancer l’émission sur les primaires à droite, que Villepin balaie rapidement, en disant qu’il n’y est évidemment pas favorable. Il sait bien que les campagnes présidentielles sont déjà beaucoup trop longues, trop rapprochées aussi, alors nous faire chier avec des primaires dans les deux soi-disant grands partis, c’est vraiment la goutte d’eau pour faire déborder le vase.

Ensuite, séquence assez plaisante, car le Havrais à lunettes ne pose pas de question mais évoque brièvement l’idée générale que développe Villepin dans son livre, à savoir le fait que la France intervient trop et fait la guerre à des pays qui ne
nous ont rien demandé, ce qui s’avère être une des causes principales du fait que nous soyons particulièrement visé par le terrorisme. Il a exactement 4 minutes et 30 secondes (enfin, coupé deux fois par l’animateur) pour expliquer notamment qu’il regrette la militarisation des esprits et la culture de la guerre qui sévissent en France. Et là, alors que l’ancien Premier Ministre précisait le fait que l’on ne peut imposer la démocratie au reste du monde par la force, qui se sent obligé d’intervenir et de donner son avis ? Arielle Dombasle, en personne ! Enfin, en personne et en silicone :

« Ils n’ont pas toujours le choix, de choisir la démocratie, surtout si on est sous un régime totalitaire, c’est le principe... pardon d’interrompre comme ça, mais si le peuple pouvait choisir, les choses seraient assez simples »

Le ridicule ne tue pas, et c’est regrettable. Madame Bernard Henri-Lévy (car vraiment avec cette intervention, on ne peut que la nommer de cette manière) pense (sic) donc que tous les citoyens de ce monde rêvent de démocratie ! Cela serait trop long à lui démontrer que c’est bien sûr archi-faux ; par contre, comment ose-t-elle dire cela (en gros défendre l’intervention française en Libye emmenée par son cher et tendre), quand nous pouvons facilement constater l’état de la Libye aujourd’hui, qui est un désastre total ? Comme aurait dit Audiard, c’est à ça qu’on la reconnait, me diriez-vous. Villepin, en bon diplomate, répond plus sagement.

Et puis vient le Mali ! Le soi-disant exemple qui prouve que les interventions militaires peuvent être « réussies » ! « Mais les Djihadistes n’ont pas pris Bamako », se targue la chroniqueuse blonde. Dire que cela va revenir sans cesse, dans les aspects positifs du bilan de Hollande, et que tout le monde s’accordera sur cette ineptie... Comme si jouer à déplacer les « islamistes » allait régler le problème du terrorisme ! Plus con qu’un politique : un commentateur (journalistes, spécialistes, etc) politique !

Deuxième exemple de la journaliste pour illustrer qu’il faut intervenir et faire la guerre : la Syrie ! On est pas intervenu, la situation est terrible, donc il fallait intervenir. La vision du monde binaire et manichéenne de ces gens-là est absolument terrifiante : la guerre ou le dialogue, et si l’un des deux ne marche pas, c’est qu’il fallait opter pour l’autre option ! Villepin prend le temps, quand il n’est pas interrompu, d’expliquer que c’est beaucoup plus complexe et que cela prend énormément de temps, qu’il faut dialoguer avec tout le monde, etc. Il a de la patience, Dominique... Et dire que jusqu’ici, c’était pas si mal par rapport à la suite...

Et puis vient le Moix ! Qui, après avoir regretté ne pas avoir le temps de poser des questions sur le contenu « brillant » du livre, va donc pourrir entièrement les 20 dernières minutes avec tout d’abord une histoire farfelue sortie par une juge d’instruction au sujet de l’assassinat de 9 militaires Français en Côte d’Ivoire il y a 12 ans, dont la France aurait laissé s’envoler les coupables... Villepin était ministre de l’intérieur à ce moment-là, donc on ne comprend pas bien ce qu’il aurait à voir avec cette histoire, mais l’écrivain/chroniqueur insiste pendant plusieurs minutes, indiquant que ce flou profiterait aux complotistes, etc. Mais le pire est à venir ! Nouveau sujet choisi par le larbin de BHL : le Qatar, et les liens tendancieux que Villepin pourrait entretenir avec ce pays.
« Comme moi je ne fais pas de procès d’intention, et que je ne suis pas un journaliste professionnel, je fais mon travail et je lis des choses, alors si elles sont fausses, bien sûr, vous allez me corriger »
S’en suit une déblatération de faits plus ou moins grotesques, dont tout le monde se fout, et dont Villepin dément rapidement les plus grossiers...
« Vous êtes dans la théorie du complot. Tout ce que raconte la presse est faux... Je suis désolé, je n’ai à ma disposition que le Figaro, le Monde et Libé, que des complotistes » ose dire ce crétin de Yann Moix ! Quand on connaît les anciennes relations de ce chroniqueur... Je ne vais pas m’acharner sur ce type, ça a déjà été parfaitement fait à la suite de sa première apparition dans cette émission ici.

Et nous allons encore descendre plus bas ! C’est peu crédible, mais pourtant vrai : le niveau va encore baisser, grâce à la blonde chroniqueuse. On en arrive donc à la rivalité entre Sarkozy et Villepin et à leur « réconciliation »... Evidemment, c’est bien ça qui est important en France aujourd’hui. Tout le monde s’accorde à dire que Villepin a les meilleures analyses de tous les politiciens sur le terrorisme, et même des éléments de réponse séduisants, mais n’en parlons pas ! Il y a des langues coupées qui se perdent... Encore moins d’intérêts pour la suite, l’amitié de Villepin avec Alexandre Djouhri, le livre des confidences de Hollande à des journalistes, et puis c’est fini ! On a presque envie de dire OUF.


Puisqu’il sort un livre, ce bon Dominique fait tous les plateaux télés et radios, et vous pouvez regarder, c’est à chaque fois le même manège. Un seul autre exemple, chez Patrick Cohen, le 3 novembre, sur France Inter ; c’est fou comme ces personnes réfutent tant l’idée de l’existence d’une pensée unique dans les médias, sans s’apercevoir qu’ils pensent tous pareil. « Ah, on reçoit Villepin, bon, c’est simple : le Qatar, le Mali (on a bien fait d’intervenir), la Syrie (on aurait du intervenir), Sarkozy, etc. » Je vous invite à regarder cette interview, juste pour entendre le journaliste au cerveau malade assurer que la France n’a tué aucun civil dans ses frappes aériennes contre l’Etat Islamique ! Si, il l’a vraiment dit (à 8:54). Et aussi, une chronique de Beigbeder à déguster savoureusement, dont je retranscris ici le final (avant le résultat des présidentielles US bien sûr) : « malgré la tentative de sabotage de la candidature Clinton par le FBI, manœuvre digne de la grande époque de John Edgar Hoover, je pense qu’elle va l’emporter, et j’ai hâte de voir la tête de Donald Trump quand il aura perdu. Tout d’un coup, il sera juste un gros retraité, un looser criblé de dettes qui va rentrer chez lui retrouver sa femme sous anti-dépresseur, depuis qu’il a dit publiquement qu’il l’a trompé avec la première venue, un mauvais souvenir, une anomalie historique... [...] Sa mort en 2021 fera trois lignes du New York Times, tandis que la présidente Clinton entamera son second mandat... » Superbe autoportrait ! En espérant que cette mode du « prévoir ce qu’il va se passer » finisse par s’épuiser de honte...

Evidemment, je ne l’ai pas signalé, mais à un moment, ce grand con de Ruquier, a demandé à Villepin si ce livre était celui d’un « candidat »... On pourrait effectivement penser que Villepin, ça serait quand même pas mal, quand on voit le niveau de tous les abrutis qui se présentent ! Bien que, malgré cet article, ou la publication de son discours à l’ONU, ne vous méprenez pas : si Villepin était candidat, nous ne voterions pas pour lui. Malgré ses qualités évidentes, c’est surtout la médiocrité des autres politiciens qui fait de lui ce qu’il représente aujourd’hui ! C’est un libéral, qui s’il était aux manettes, comme lorsqu’il l’a d’ailleurs été avec Chirac, défendra avant tout dans sa politique internationale les intérêts de la France, certes plus brillament, mais avec sa vision occidentaliste. Alors sa réponse à Ruquier est la bonne ! T’as raison Dominique, fais comme nous, abstiens-toi !

Gustavo Mazzatella

1 commentaire:

  1. Merci ! J'ai savouré. Au plaisir de vous lire à nouveau
    Une fidèle du blog.

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