samedi 13 juillet 2013

Ne perdons pas de temps avant d’être vieux. Marie Jeanne.

Clic-cloc…Clic-cloc…

Les repas de famille sont une torture lente où le temps semble suspendu aux lèvres de plus ancien et où l’hypocrisie se distille avec une douceur nocive en chacun de ses membres. Le poison est d’autant plus efficace lorsqu’il s’agit de ta belle famille.

A côté de « Mémé disjonctée » (dont les fusibles ont tous lâchés), v’là 15 fois que tu écoutes l’histoire de la monarchie anglaise du XVIIe siècle, dont tu te contrefous royalement. Ta moitié, à l’autre bout de la table, se délecte de te voir ainsi en souffrance ; parce que tout le monde, dans cette famille, sait que Mémé disjonctée n’est pas sur la même temporalité. La preuve, elle commence toujours ses histoires par « Je te raconte rapidement ». Rapidement ? T’es sérieuse mémé ?


« La notion de temps chez certaines personnes mérite un grand suicide collectif. » Nicolas Rey devrait obtenir la légion d’honneur pour cette analyse hautement pertinente. Pour le bien de la société, la dégénérescence des cellules devrait entraîner chez tout un chacun une lucidité d’autodestruction immédiate. Heureusement, nous le savons déjà, quand la nature ne fait pas bien les choses, l’homme crée des lois. Or, certaines fois, son désir de palier à des tares biologiques se laisse brimer par un discours moralisateur qui l’amène à renfermer la loi pour un usage particulier. Selon l’article R.413-19 : « Aucun conducteur ne doit gêner la marche normale des autres véhicules en circulant sans raison valable à une vitesse anormalement réduite. » Pourquoi ne pas généraliser cette loi à d’autres domaines ? Et en plus de la démocratiser, on pourrait aussi y appliquer une peine plus conforme. L’idée de Nicolas semble pertinente. Une condamnation à mort pour les ralentisseurs de vie active.

Ne pleurez pas gérontophiles avérés, voyez plutôt en ce geste une aide à accélérer le processus normal de la vie. Comme le dit Michel Onfray : « Ma mission est de tuer le temps et la sienne de me tuer à son tour. On est tout à fait à l’aise entre assassins. » Puisque le temps nous assassine tous, aidons le un peu à gagner… du temps. De toute façon, les croutons n’en ont plus pour longtemps alors soulageons tous les jeunes dynamiques qui se retrouvent en souffrance à cause d’eux. D’autant que cette gangrène se propage… Ils sont partout les chibanis ! Ils créent des bouchons dangereux sur les routes de la même façon qu’ils ralentissent les files d’attente (au supermarché, au bureau de tabac, au cinéma… et ils sont certainement de mèche avec les agents de la Poste !). Les plus sportifs d’entre eux traversent un passage piéton en un temps record de nombre de feux verts perdus pour les automobilistes en faction.

A leur décharge, les personnes âgées ne contrôlent plus leur corps. Elles marchent plus lentement. Nous devons prendre en compte le fait qu’elles peuvent moins bien apprécier les obstacles parce qu’elles perdent leurs capacités visuelles et auditives. Elles ne perçoivent pas l’arrivée d’autres usagers dans leur dos. Il faut éviter de les surprendre. Un acte de civilité peut-être de les aider, notamment lors de la traversée de la chaussée. Le passage piéton pourrait par exemple être relié aux feux tricolores avec un décompte visuel en seconde. Une fois arrivé à zéro, les bandes blanches balanceraient des décharges de 3000 volts. Si mémé prend trop de temps pour traverser… POUM !... Une décharge et elle se retrouve propulsée dans le futur, elle atterrit directement dans sa prochaine demeure, le cercueil en pin massif.

Il serait aussi d’utilité publique de généraliser cette loi dans le cadre des supermarchés. Comme il est interdit de ralentir la circulation routière, il devrait être mortellement réprimé de faire trop d’achats pour les retraités. Ayant une période de congés illimitée, ils ont tout le temps nécessaire pour revenir plusieurs fois alors 1 article par heure, pas plus, ça suffit. Et avec un peu de chances, les allers-retours quotidiens finiront par tous les tuer.

Mémé disjonctée n’est jamais fatiguée. Elle est en forme physiquement, c’est son cerveau qui est grillé mais, comme dit mon grand-père : « quand le vers est dans la pomme faut l’éliminer pour sauver le reste du panier ! »

Pour sauver la planète du réchauffement climatique, une fois par an et pendant une heure, nous éteignons tous nos lumières. Pour sauver le monde entier de sa lenteur et décrépitude, organisons, une fois par an et pendant une heure, une battue de vieux.
Cours petit pépé cours…

Clic-cloc… Clic-cloc…

Marie Jeanne.

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