mardi 13 janvier 2015

L'interview du professeur Choron !

Extrait du livre « Je bois, je fume et je vous emmerde », entretiens philosophiques entre le Professeur Choron et Jean-Christophe Florentin. Morceau choisi.

9 décembre 1991, 15 heures 15.

[...]

Jean-Christophe Florentin : Professeur Choron, la propagation du sida vous inquiète-t-elle ?

Professeur Choron : Les hommes savent depuis longtemps stopper net les terribles épidémies de maladies contagieuses mortelles. Prenons pour exemple la fièvre aphteuse qui dissémine les troupeaux de bovins. Eh bien, on abat tout simplement les animaux malades. Le procédé est cruel, mais combien de boeufs, veaux, vaches, ont été sauvés grâce à cette mesure radicale. En ce qui concerne le sida, ne nous voilons pas la face, la solution est là.
D’ailleurs, il n’y a pas si longtemps, les américains ont démontré l’efficacité de
cette pratique autoritaire, douloureuse, mais globalement positive. Souvenons-nous, l’Allemagne était battue, mais les Japonais continuaient la guerre. Cette guerre pouvait durer des années, avec comme conséquence, quelques millions de morts à rajouter au paquet.
Tagadac ! Tsoin ! Tsoin ! Que font les Américains ? Ils balancent une bombe atomique sur la gueule des Japs - ... quelques centaines de milliers de morts... pas plus... Et la guerre s’arrête. Comme quoi, il faut savoir sacrifier quelques sujets, pour sauver la vie de beaucoup d’autres.
Et à propos du sida, je voudrais dire deux mots sur des éboueurs honorables, convenables, estimables, charitables, serviables, secourables, miséricordieux, qui ont balayé et jeté aux ordures les travelos du bois de Boulogne. Prétexte : le sida. Super-prétexte : les putes se font sauter ou sucent sans capote. Devant cette affirmation, j’ai honte pour ces éboueurs, j’ai honte de leur imposture, de leurs grossiers mensonges. Prétendre que les putes n’utilisent pas de préservatifs ! Alors que se protéger fait partie intégrante de leur métier de marchandes d’amour. Tout comme le mineur de fond met un casque pour creuser la galerie. D’ailleurs, elles n’ont pas attendu le sida pour utiliser les capotes... Elles ont toujours eu à se cuirasser, contre les syphilis, chaudes-pisses et autres véroles... Et c’était à l’époque ou ces mêmes éboueurs menteurs faisaient voter une loi interdisant la publicité pour les préservatifs, sous le savoureux prétexte que ces pubs incitaient à la débauche.
Paris sans bordel... Paris sans travelos. Circulez, y a plus rien. Sinon à Marne-la-Vallée, on peut enculer Mickey... mais ça fait quand même un peu loin.
Je défendrai toujours la prostitution comme un service public que nul n’a le droit de nous enlever. Le puceau ne sera jamais aussi bien éduqué que par une pute, ou bien alors faut que sa mère s’y mette !

JCF : Professeur Choron, dans tous vos propos, on sent une ambiance antimoraliste, antireligieuse.

PC : Les hommes n’arrivent pas à se mettre dans la tête qu’ils disparaîtront définitivement, un jour. Qu’ils ne sont finalement qu’une bonne farce de la nature. Au même titre que les carottes qui font de la graine pour finir en boeuf mode. Les religions sont là pour prétendre le contraire. Et elles en vivent ! Royalement ! Encouragée par tous les pouvoirs... Les religions me font vomir et je regrette qu’on m’ait appris ce mot parasite à l’école.
Revenons à Jésus, il guérissait les malades. Mais il n’a jamais enfoncé trois doigts dans le cul d’un constipé pour qu’il puisse chier ! Il guérissait les aveugles mais pas les constipés. Racisme, moi je dis !

JCF : Excellente transition pour aborder le domaine de la grande pauvreté. Quelle mesure préconiseriez-vous par exemple pour combattre la faim ?

PC : La faim n’est pas une maladie. Même si on en meurt. Elle procure une mort dénuée de souffrance, paisible et saine. L’affamé souffre de la faim pendant deux jours. Puis cette faim disparaît dès le troisième jour. Seul subsiste un grand vide dans la tête, générateur de vertiges. Cette sensation est à rapprocher de celle que ressent le drogué qui se piquouse. Le sous-alimenté plane littéralement et meurt dans un espèce de rêve glouton, merveilleux où apparaissent des images magnifiques : chocolats fondants dans un océan de crème fraîche, pluie de pommes de terre frites brillantes comme de l’or, moquette en purée d’épinard dans laquelle s’enfoncent les pieds nus, etc. Par contre celui qui bouffe trop; crève généralement du cancer du goinfre, et dans d’horribles souffrances. En conséquence, les affamés planeurs sont moins à plaindre que les nantis hurleurs.

JCF : Faites-vous confiance aux associations caritatives qui combattent la pauvreté ?

PC : Elles combattent surtout leur propre pauvreté parce que, avant tout, elles en vivent. Voitures de fonction, appartement de fonction, remboursement de leurs frais... Après, elles font leurs comptes : que reste-t-il pour les pauvres ? rien, ... bon... bien, on va recommencer la quête !
Puisque l’on est chez les malheureux, parlons de la lèpre, celle qui ronge le nez : la lèpre commence toujours par bouffer les crottes à l’intérieur des narines... tu fouilles ton pif, tu ne trouves pas de crottes, alors là, faut vite foncer chez le toubib !

JCF : Êtes-vous sensible à la beauté fulgurante de l’art contemporain ?

PC : Je suis surtout sensible à la dimension du compte en banque de certains artistes. Prenons César par exemple, c’est tout le contraire du talent de Jésus : celui-ci multipliait les pains tandis que César, lui, il prend une boulangerie, la boulangère, le boulanger, le mitron, et de tout ça, il fait un petit pain. C’est du beau travail d’artiste, bravo César.
Mais parmi tous les arts, c’est la chorégraphie qui me fait quand même le plus rire. Les danseurs se donnent tellement de mal pour avoir l’air de gracieuses libellules alors qu’ils demeurent désespérément de grosses enclumes tremblotant sur leur socle. Entre autres, j’abomine les féeries de Prisunic, genre spectacle Crazy Horse Saloon, avec ses tableaux de poupées gonflables sans poil sous les bras... Beurk ! Fadasses gélatines pour étal de tripier. Véritables coupe-faim à l’appétit sexuel.
J’ai par contre un petit faible pour le jazz. A propos du jazz, tu sais que ce ne sont pas les nègres qui l’ont inventé. Relisons l’histoire de France : en l’an 778, Roland dans le défilé de Roncevaux et Charlemagne à quelques kilomètres de là en compagnie de Ganelon. Tout à coup, Charlemagne tend l’oreille en interrogeant Ganelon : « T’entends rien, toi ? on dirait le saxophone de Roland... et je l’imagine mal donnant un concert de jazz aux Sarrasins...
- Non, sire, répondit le traître, ce n’est pas Roland, c’est Yvette Horner et son accordéon. »

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