vendredi 20 mars 2015

Silence, on dort ! Gustavo Mazzatella.

Merci à Mle L. et son joli minou
Très récemment dans le train, en plein trajet, une personne est venue remplir mon champ de vision. Compartiment de 4 personnes, elle s’est installée à côté du jeune homme qui me faisait face. Ils se connaissaient. Bien au-delà du court dialogue qui s’est instauré entre eux, il s’est passé quelque chose qui m’a frappé. Lui lisait Le meilleur des mondes, et elle a sorti le Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline. J’en arrive à l’événement important qui me fait vous raconter tout ça : elle a préféré dormir plutôt que de lire un des plus grands romans du siècle dernier, qu’elle n’avait encore « jamais lu ». Tilt ! Car ce fait totalement anodin illustre parfaitement ma pensée actuelle. On vit dans un monde où lorsqu’on a le choix entre Céline et le sommeil, on pionce. Certes, elle l’a raconté à son ami, elle était extrêmement fatiguée, et moi le premier j’aurais sans doute roupillé si j’avais été dans un état semblable au sien. Toujours est-il que c’est un exemple hyper
significatif de nos vies ! Je m’explique.

Observez bien notre espèce humaine, regardez-la évoluer dans le monde actuel, et vous entendrez résonner les ronflements terribles d’un sommeil profond et lâche. Toujours sur nos écrans, connectés comme des cons, soi-disant ouverts sur le monde mais bien renfermés sur notre nombril en réalité. Avant, on jugeait le comportement de son voisin, maintenant, on se pose en flic moraliste d’un individu évoluant de l’autre côté du globe, dont on ne sait strictement rien. Tu parles d’une évolution... On s’invente des ennemis sur le net, une distraction comme une autre. On défend virtuellement des causes, une auto-satisfaction comme une autre. Impossible de regarder son « prochain », pour la simple raison que l’on n’y verrait que soi-même, sa propre médiocrité, sa propre tristesse. L’uniformisation a tué l’individu. Capitalisme et communisme, même combat : mort à l’individu ! Tous égaux, tous pareils, tous inertes ! Penchez-vous sur les HLM, survolez les pavillons de banlieues construits en séries, l’Homme s’est transformé en une fourmi, à la différence que lui n’est pas fait pour être anodin. L’amour-propre est enterré bien profond... On s’insurge justement contre la ferme des 1000 vaches, mais ça fait des dizaines d’années que l’on devrait s’affoler du pays des 65 millions de moutons. On ne voit et agit qu’au travers du profit ou du social, sans jamais prendre en compte l’esthétique, la beauté, le poétique, l’humain. Le fautif n’est ni le capitalisme, ni le libéralisme, ni le socialisme, mais celui qui a inventé ces idéologies néfastes : l’Homme.

L’homme contemporain n’en finit pas de s’asservir, d’accroître sa soumission et sa dépendance à de vulgaires gadgets. Un moteur de recherche qui vous donne accès à « tout » en un clic, un gps pour trouver sa route, une application pour reconnaître une musique, un logiciel permettant de ranger soigneusement des citations dans des cases et j’en passe et des moins bons. Il faut écrabouiller la mémoire ! Démanteler la réflexion ! Saborder son cerveau ! On n’arrête pas le progrès, mais on stoppe net l’être humain. Il faut absolument préserver la santé physique afin d’être apte à utiliser sa force de travail, pour le reste, ne bougez plus, on s’occupe de tout. Vivre pleinement sa vie de larve, voilà le Graal contemporain. La passion n’existe plus. Anesthésie générale ! Dictature du « cool blasé », qui ne s’intéresse à rien. On amasse des biens, un matérialisme qui ne cache en aucun cas notre angoisse de réel. L’instinct n’est plus non plus, on ne sait pas où l’on doit aller, alors on se rattache à nos origines, ce qui ne mène nulle part.

La vie n’existe qu’au travers de la vérité, et nous évoluons sous le règne du faux : le faux amour, la fausse information, la fausse amitié, la fausse politique, les faux sentiments, le faux art, la fausse subversion, les faux débats. L’hypocrisie est un devoir. Le mensonge est un droit. Faux culs et diffamateurs, voilà ce que l’on est. Évidemment qu’on s’endort ! La faute à qui ? Facile de pointer du doigt les élites... Surtout que ça serait les surestimer que de penser qu’ils agissent délibérément. Il faut les voir comme ils sont : des infirmes, aveugles, sourds, dénués d’odorat. Alors qui d’autre accuser ? La partie des gens « cultivés » qui rêvent « d’en être » de ces andouilles ? Ou celle qui n’en a rien à foutre, totalement dépassée par cette situation et qui trouve refuge dans l’alcool, la drogue, la musculation, les jeux vidéos, ou je ne sais quel échappatoire grotesque ? On passe son temps à le perdre. Tuer le temps, l’occupation vénérée de notre civilisation moderne. Tu m’étonnes que l’on ait peur de mourir, tellement pressé et heureux dans notre existence quelconque. La petite mort, ça va, mais pas la grande ! La vraie...

Je veux revenir sur les transports. Ceux en « commun », dans lesquels se ressent le mieux l’individualisme répugnant des humains. Une rame de métro, un wagon de train, un bus, dans tous ces décors on retrouve continuellement les mêmes scènes ; une majorité de personnes écouteurs sur les oreilles, yeux rivés sur un écran, d’autres la tête plongée dans un journal ou un livre, ceux qui rêvassent naïvement, ou encore ceux qui instaurent un semblant de conversation inintéressante, dans laquelle l’important est d’exprimer son point de vue sans écouter celui du voisin. Et bien sûr, les ronfleurs ! Ceux qui assument le mieux l’ennui de leurs vies... Je suis profondément individualiste et pour l’individualisme, tant que l’être humain cherche à s’élever, en quête d’une ascension bénéfique à la fois pour lui mais aussi pour les autres. Rien à voir avec notre époque qui résume la réussite à travers le fric et le pouvoir, dont l’individu n’est qu’un larbin. L’élévation de l’âme, tel doit être le but intérieur et intense de chaque terrien. Pas de pseudo-individualisme visant à satisfaire son égo par autrui. Il ne s’agit pas là de marcher sur son voisin mais de cavaler en soi.

L’imagination n’est plus. Même nos rêves ne sont que de tristes réalités. L’esprit somnole, l’âme est éteinte. Seul le corps bouge, vaguement. Un corps sans esprit, c’est aussi apathique qu’un esprit sans corps. On se déplace sans cesse... Tout va toujours plus vite, mais c’est de moins en moins alerte. Prendre des vitamines ne rend pas plus vivant. On se fuit soi-même, de l’abrutissement devant sa télé, de la pseudo-intelligence devant De Caunes ou Calvi, du néant devant Hanouna, les oreilles bombardées sans cesse, surtout ne jamais rester seul avec soi-même, s’autoriser un brin d’introspection. Je crois que chacun d’entre nous doit se prendre par la main, et se forcer à rentrer au plus profond de soi-même pour y découvrir l’humanité que nous enfouissons derrière un amas de merde.

Gustavo Mazzatella.

2 commentaires:

  1. Oh mon dieu.. l'énorme faute ! C'est scandaleux ! "regardez-là" Dommage, cela aurait pu être un texte saisissant...

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    1. Alors relisez-le et soyez saisi ! Grâce à vous, cette énorme faute a été corrigée. D'ailleurs, si vous vous ennuyez le 12 de chaque mois, nous vous enverrons tous nos textes dans lesquels vous vérifierez l'orthographe...

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