mardi 27 juin 2017

Vive Proust !

Qu’est-ce qu’elle a été rude, cette période... Campagne présidentielle, élection présidentielle, entre-deux-tours, un nouveau président, puis rebelote avec les législatives... Et au-delà de ces conneries, encore plus lourdingue : le commentaire des « gens » ! Philosophes, anonymes, hommes et femmes de médias, artistes, comptes Twitter, sociologues, amis Facebook... personne n’a pu s’empêcher ! Mais au moins, les médias, ils en vivent (ou vivotent, plutôt) de cette merde... Alors que les « gens »... Quel intérêt ? L’affaire Pénélope Fillon, la « remontada » Mélenchon, son hologramme à la con, le phénomène Macron, son homosexualité, Poutou le fou, Marine Le Pen la danseuse étoile, Brigitte Macron par-ci, Brigitte Macron par-là, Guaino complètement marteau, l’agression d’NKM, le mandat ministériel flash de la pirouette Bayrou... ça ne s’arrête jamais ! Tout le monde y va de sa toute petite phrase, de sa dérision à deux balles. Lachez l’affaire les gars ! Quelle perte de non-énergie...

La campagne présidentielle s’est terminé il y a quelques semaines, mais il ne faut pas croire que l’on va être enfin débarrassé de toutes ces saloperies. Bien au contraire ! Ça n’en finit jamais je vous dis. Et toujours avec cette fâcheuse impression de descendre de plus en plus bas... Rien à voir avec la personne qui est élue, d’ailleurs. C’est un ensemble d’éléments néfastes qui nous rongent jusqu’à l’os. S’en protéger ? Un job à plein temps... mais ça vaut le coup de faire l’effort.

Ma planche de salut : Proust ! A la recherche du temps gagné ! Quel bonheur... Merci Marcel ! Grâce à toi, j’ai pu survolé tout ça, paisiblement. Cela faisait plusieurs années que ça commençait à me travailler, au printemps, la lecture de ce monument... Il me faisait du gringue, avec sa moustache. Peut être que l’élément déclencheur fut la découverte de l’unique document vidéo où l’on voit furtivement Marcel descendre un escalier. C’était lors d’un mariage, en 1904, celui d’Armand de Guiche et d’Elaine Greffulhe. Quelques secondes suffisent... Un siècle, douze ans et quelques mois plus tard, je m’élance : « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. » Aussi grandiose et beau que : « Ça a débuté comme ça. » Quelle joie ! Quasiment tout de suite, après seulement quelques pages d’acclimatations à la phrase proustienne.


Arrêtez de flipper les mecs... Vous vous êtes bien remis du mandat désastreux de Nicolas Sarkozy. Les cinq années pourries de Hollandisme n’ont rien changé de fondamental à votre vie. Le quinquennat d’Emmanuel Macron qui s’annonce bien morose vous en fera bouger sans toucher l’autre. Proust peut bouleverser une existence ! Rien que ça ! Odette, Gilberte, Albertine... Tous ces prénoms sont dorénavant pour moi autrement plus sensuels que Sophia, Anna ou Tiffany. Il est possible de passer sa vie à lire sans cesse et inlassablement la recherche. Les militants de partis politique s'essoufflent au bout de quelques années, de plus en plus rapidement. Ils peuvent changer de « camp » autant qu’ils veulent, l’évidence de l’inutilité de leurs actes vient inévitablement.

Il faut bien comprendre une chose : on devient beaucoup plus dangereux pour le pouvoir en place et l’Etat en particulier en lisant Proust plutôt qu’en votant pour un des onze derniers candidats à l’élection présidentielle, quel qu’il soit. Proust évoquant la sensation que lui procure la lecture dans « Du côté de chez Swann » c’est mille fois plus subversif qu’une « proposition choc » d’un candidat, que ce soit un changement de République ou la sortie de l’Union Européenne... Ce sont des broutilles en comparaison à la sensibilité de Marcel. L’écriture proustienne transcende mille fois mieux qu’un discours de Macron, sans même évoquer la quantité véridique que contient l’une et dont est dépourvue l’autre. Je vois plus de Justice dans la recherche que dans le programme déjà oublié de Mélenchon. Finalement, c’est très simple : la politique c’est rien, Proust c’est tout. Tout est dans Proust. Vive Proust !

La politique n’est pas un art, il sera possible s’intéresser véritablement (autrement qu’en critiquant facilement et se moquant stupidement : tels sont les « actes » politiques du commun des mortels aujourd’hui) à la politique le jour où un artiste fera de la politique ou alors le jour où un politicien sera un artiste. Pas un humoriste cherchant le buzz, non, un artiste. Et le jour où il fera de la politique comme il pourrait peindre ou écrire, c’est-à-dire avec son âme d’artiste, sa sensibilité. Je suis sûr que c’est possible. Aucun mystère dans la politique ; les magouilles politiciennes n’ont strictement rien de mystique. D’ailleurs, c’est même devenue tendance et obligatoire : la transparence pour tous ! Opaque quand même, faut pas déconner... Stop ! J’ai failli tomber dans le panneau avarié du cirque politico-médiatique ! Je m’en retourne du Côté de Guermantes.

Gustavo Mazzatella

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